L’Abbaye de Macheret
Localisation
La celle de Macheret était située sur la commune de St Just Sauvage, canton d'Anglure. De Romilly-sur-Seine, prendre la route d'Anglure ; après avoir traversé le canal du Moulin (ce moulin a appartenu aux grandmontains), prendre une petite route à droite pendant 1,5 km, la celle de Macheret se trouvait dans un grand champ à gauche de la ferme. L'appellation actuelle du lieu est : ferme de Macheret.
Vestiges
Aucune trace apparente des bâtiments. Toutefois, M. MICHEL a mis à jour un puits dans le champ, et un panneau dans la ferme aux armes de Salazar a été récupéré. Dans l'église d'Anglure, les boiseries et la statue de la Vierge avec chérubins d'une très belle facture du XVIIIe siècle (mobilier classé Monuments Historiques) proviennent de Macheret.
Histoire
La charte de fondation de Macheret date de 1168 et a été faite par Guillaume de DAMPIERRE, baron de St Just, et Hugues de PLANCY. Elle fut approuvée par Henri le Libéral, comte de Champagne. Louis GUIBERT dit avoir trouvé dans l'inventaire sommaire des Archives de l'Aube, une charte de Guillaume de DAMPIERRE donnant des bois et qui serait antérieure à 1168, ce qui est tout à fait vraisemblable, car les Grandmontains prenaient un certain temps de réflexion avant de se fixer définitivement en un lieu...
Cela est d'ailleurs confirmé par deux autres faits : d'une part, Jean LEVESQUE, dans ses Annales, a écrit que Macheret avait cent ans d'existence en 1230, et d'autre part, les Clunisiens de St Just renoncèrent à leur droit d’usage sur les bois de Macheret entre 1164 et 1168, afin de le donner aux Grandmontains.
Dans sa confirmation de la charte de Guillaume de DAMPIERRE, Henri le Libéral prévoyait le cas où les frères seraient amenés à ne pas s'établir sur le site de Macheret. Les indications sur la durée de construction d'une celle sont en effet très rares. Cette durée est très variable, mais d'après les quelques documents qui nous sont parvenus à ce sujet, nous savons que, par exemple, la celle de Montaubérou (près de Montpellier) fut fondée entre 1174 et 1180, qu'elle était en construction en 1190 et que l'église ne fut bénie que le 21 novembre 1225...
Un article du Coutumier de Grandmont prévoyait que pendant la construction de la celle, les frères pouvaient êtres hébergés chez un hôte. Plusieurs auteurs pensent, à juste raison, que le bâtiment Ouest, construit souvent en matériaux légers, était le premier mis en œuvre pour abriter rapidement les religieux.
Guillaume de TREIGNAC, avant d'être élu Prieur de l'Ordre de Grandmont le 14 août 1172 avait été le correcteur de Macheret ;, mais lorsqu'il fut en butte à la révolte des convers à Grandmont, il se démit de sa charge et revint à Macheret comme correcteur. Il fit le voyage à Rome pour mettre le Pape en garde contre les intrigues et la corruption dont avaient usé les convers pour s’assurer des appuis auprès des autorités séculières et même épiscopales. Il y mourut le 18 novembre 1188. Pardoux de la Garde écrit que ses os avaient été rapportés à Grandmont après incinération.
Les Grandmontains s'étant fixés définitivement à Macheret, Hugues de PLANCY leur "aumôna" le four banal du village de Plancy, avec l'engagement qu'il ne donnerait aucune autre autorisation. Il leur donna également la concession de bois et de terres, avec haute et moyenne justice.
Mais en 1203, les Grandmontains furent attaqués dans la jouissance du four banal par les religieux de la léproserie de Plancy. L'Official de Sens débouta ces derniers et maintint les droits des Grandmontains sur ce four.
En avril 1220, Guillaume de DAMPIERRE constitua définitivement la dotation de Macheret aux Grandmontains. Il leur donna ainsi tous les bois de Macheret, de nombreuses rentes en blé, en vin, en seigle, en avoine et des droits sur certains péages.
Les «Macherets" était le surnom que l'on donnait aux bonshommes de Grandmont dans l'Est de la France.
Toutefois les Grandmontains ne furent pas aussi heureux avec Guy de DAMPIERRE, fils de leur bienfaiteur. Si celui-ci avait tout d'abord augmenté les revenus du monastère, il décida un jour de tout récupérer... Ainsi, Guy de DAMPIERRE pénétra dans le monastère avec une bande de «coupe-jarrets» qui égorgèrent correcteur et religieux. Puis, Guy de DAMPIERRE enleva les titres du chartrier et s'empara de tous les biens qu'il décida d'exploiter. Le Prieur Général de l'Ordre se plaignit énergiquement au Pape Grégoire IX qui excommunia Guy de DAMPIERRE. Abandonné de tous, celui-ci dut reconnaître sa faute et remit à l'Ordre tous les biens qu'il lui avait enlevés, et même en ajouta d'autres...
En effet, l'accord passé en avril 1227 avec les religieux stipulait que Guy de DAMPIERRE leur redonnait les biens spoliés et s'engageait à protéger les moines, et qu'en contre partie, ceux-ci renonçaient à toutes plaintes et demande d'excommunication envers lui ; en outre, Guy de DAMPIERRE devait faire ratifier cet accord par le Roi, par le comte de Champagne, par l'évêque de Troyes, par les juges de Paris, par les sires Archambaud de BOURBON, Guillaume de DAMPIERRE, DROCON et Guillaume MERLOT. De leur côté, les "Macherets" firent ratifier cet accord par leur Prieur Général, Elie ARNAUD. Ce dernier accepta et envoya de nouveaux religieux en 1237.
En 1248, Guillaume d'UNGRES, treizième Prieur Général, démissionna de sa charge et se retira à Macheret comme correcteur. Il y mourut le 25 juin 1248. En 1295, la celle de Macheret hébergeait 8 clercs et était taxée de 15 livres sur la liste des pensions à payer à Grandmont. Le 17 novembre 1317, le Pape Jean XXII érigea Macheret en prieuré; il lui unit trois petites celles :
On peut citer l'existence d'un certain Gui SERVIENTIS, licencié en décrets, prieur de Macheret qui assistait en tant que tel à la promulgation de la bulle "Pastoralis Officii" le 23 janvier 1347. On relève de très nombreux dons à Macheret tout au long des XIIIème et XIVème siècle et il serait fastidieux de les énumérer tous. On relèvera néanmoins celui de Jean de CLERMONT, comte de Boulogne et d'Auvergne, et de sa femme, Jeanne, qui, en 1365, donnèrent au prieuré de Macheret, dix livres de rente, en contrepartie desquels les religieux devaient célébrer trois messes par semaine pour le repos de Jean de CLERMONT à condition qu'il soit enterré dans le prieuré. Mais celui-ci n'y fut pas inhumé, mais son gendre, connaissant le voeu de son beau-père, maintint la donation et la doubla même le 3 janvier 1365 contre cinq messes par semaines.
En 1372, Macheret eut comme prieur Ramnulph ITIER. Celui-ci était pieux et savant, aussi fut-il choisi en juillet 1385 comme Abbé Général de l'Ordre de Grandmont. Mais les temps étaient forts troublés (Guerre de Cent Ans) et ce dernier ne put rejoindre Grandmont. Il demeura à Bois-Rahier près de Tours où il tint un Chapitre Général en 1386. Il devait mourir en Avignon le 1er avril 1387 ( ou 1388).
En 1456, le frère Michel de LAVAL devint prieur de Macheret, avant d'aller à Chavanon; il fut remplacé à Macheret par Guillaume PRIMAUD. En 1462, les Anglais brûlèrent le prieuré de Macheret après l'avoir pillé. Récemment, des fouilles révélèrent des squelettes entassés tête bêche et dont les ossements démontrèrent les sévices auxquels les personnes enterrées avaient succombé (os cassés, crânes enfoncés,etc)...
Le roi CHARLES VII fit reconstruire le monastère et y rétablit les religieux, qu'il plaça sous sa protection. La vie étant devenue plus tranquille, les Grandmontains de Macheret purent se distinguer par des oeuvres philosophiques ou littéraires. Nous citerons en particulier: